En éthique biblique, on accorde une grande importance à la parole humaine. Nous avons déjà vu que dans la première prière du Notre Père, Christ nous enseigne à demander que le nom de Dieu soit sanctifié, qu’il soit considéré comme sacré et traité avec révérence et respect ; tout ce qui ne répond pas à cette norme constitue un blasphème. Tout blasphème est une offense grave à l’encontre de Dieu, et la fréquence à laquelle il est commis dans ce monde ne diminue en rien la gravité et l’indignité de cet acte. Mais dans ce cas particulier, nous parlons d’un certain type de blasphème et non du blasphème en général.
Ici, Jésus répond aux pharisiens, qui se sont engagés dans une opposition farouche et constante à son égard. Ils représentaient ceux qui connaissaient le mieux tout ce qui concerne Dieu, sa loi et la théologie de l’Ancien Testament. S’il y a bien un groupe de personnes aurait dû être le premier à reconnaître l’identité de Christ en tant que Fils de l’homme et en tant que Messie promis, c’était bien celui des pharisiens. Mais, au lieu de cela, ce sont eux qui se sont opposés le plus farouchement à lui.
Parallèlement, le Nouveau Testament met clairement en lumière l’ignorance profonde qui voile les yeux des pharisiens. Nous voyons cela à la croix, puis dans 1 Corinthiens. Sur la croix, lorsque Jésus prie pour le pardon de ceux qui l’ont livré afin qu’il soit exécuté, il dit ceci : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lu 23.34). Et dans 1 Corinthiens, Paul écrit : « … sagesse qu’aucun des chefs de ce siècle n’a connue, car, s’ils l’avaient connue, ils n’auraient pas crucifié le Seigneur de gloire » (1 Co 2.8).
La réponse de Jésus semble être un avertissement pour les pharisiens : ils se rapprochent dangereusement d’une limite au-delà de laquelle il n’y aura plus d’espoir pour eux. Avant que cette ligne ne soit franchie, Jésus peut prier pour leur pardon en invoquant leur ignorance, mais passé ce point, il n’y aura plus de pardon.
Tout au long de sa vie terrestre, la gloire de Christ a été voilée. Mais ensuite, il a été ressuscité par le Saint-Esprit et il s’est présenté, par le Saint-Esprit, comme le Fils de Dieu. À partir de ce moment-là, il est devenu bien trop grave d’affirmer qu’il aurait accompli ses œuvres par le biais de la puissance de Satan plutôt que par la puissance du Saint-Esprit.
Ainsi, une personne commet le péché impardonnable lorsqu’elle est convaincue, par l’illumination de l’Esprit, que Christ est le Fils de Dieu, mais qu’elle en arrive à la conclusion et déclare verbalement qu’il est démoniaque.
Le livre de l’épître aux Hébreux résume la problématique pour nous :
Car, si nous péchons volontairement après avoir reçu la connaissance de la vérité, il ne reste plus de sacrifice pour les péchés […] De quel pire châtiment pensez-vous que sera jugé digne celui qui aura foulé aux pieds le Fils de Dieu, qui aura tenu pour profane le sang de l’alliance, par lequel il a été sanctifié, et qui aura outragé l’Esprit de la grâce ? (Hébreux 10.26,29).
Par conséquent, la distinction entre le fait de blasphémer contre le Saint-Esprit et blasphémer contre Christ disparaît dès lors que la personne a conscience de qui est Jésus.
Nous savons que l’une des œuvres les plus importantes qui sont accomplies par le Saint-Esprit dans la vie du chrétien est celle de la conviction du péché. Et le but de l’œuvre de l’Esprit qui consiste à nous convaincre du péché est de nous amener à la repentance, afin que nous puissions être pardonnés et restaurés dans la plénitude de la communion avec Dieu.
Aux gens qui craignent d’avoir commis le péché impardonnable, je dis souvent que s’ils l’avaient réellement commis, il est fort probable qu’ils ne seraient pas dérangés par cela. Leurs cœurs seraient déjà devenus si récalcitrants et endurcis qu’ils ne seraient pas en train de lutter et de se débattre avec cette question. Les personnes qui commettent un tel péché ne s’en soucient pas, c’est pourquoi le fait même que ceux qui me posent la question s’inquiètent d’avoir peut-être offensé Dieu de cette manière prouve de manière significative qu’ils ne l’ont pas commis.
Pasteur R.C. Sproul